J’ai pris beaucoup de plaisir à lire des essais et me suis passablement ennuyée avec les romans. Autant avec les premiers il y avait un véritable choix, pour ne pas dire un besoin de me plonger dans de tels ouvrages, autant les romans j’ai tenté de me bousculer un peu et ce fut un assez large fiasco. J’ai même (ré)essayé (par oubli ? gentillesse ?) d’ouvrir une romance en espérant un autre résultat qu’un abandon, parce que je me suis dit que peut-être, ce n’était pas si catastrophique quand même et qu’e peut-être’il était possible, surtout, que j’ai besoin de poser ma fatigue, mon cerveau, d’aller à la facilité. Nop.
J’ai donc reposé Contes modernes de Noël au bout de quelques pages, livre qui aurait besoin d’une profonde relecture et d’un remaniement solide. Et ça m’énerve parce que l’autrice est une femme adorable. Rien que la seule citation posée sur Babelio a un problème de temps et de répétition. En tant qu’ancienne écrivaine publique, ça me crispe (elle est entourée de relecteurs et correcteurs pourtant) et en tant que personne je me demande de quoi je me mêle alors que tant de lectrices accrochent bien. Promis, je ne retenterai pas (je l’avais déjà dit mais cette fois je jure, main levée et tout).
Je me sens comme une épouvantable lectrice élitiste et grincheuse.
Précisions sur ma notation Babelio
. 0.5 ⭐n’aurait pas dû être écrit
. 1 ⭐pas beaucoup mieux, mais il y a pire visiblement
. 1,5 ⭐pas terrible
. 2 ⭐c’est assez mauvais mais certaines choses sont à sauver
. 2,5 ⭐ impossible de trancher entre ça m’a plus et j’ai détesté, vide intersidéral
. 3 ⭐ pas mal, sans plus
. 3,5 ⭐bien, quelques réserves
. 4⭐ j’ai adoré
. 4,5 ⭐ presque parfait
. 5 ⭐ perle rare
Août : 5 livres lus en entier, 3 lus en accéléré, 1 abandonné


Nos puissantes amitiés – Alice Raybaud
Le livre m’a été offert par Blanche, pour sa puissance féministe comme pour le sujet lui-même qui forcément nous parle particulièrement. L’autrice part d’un constat : un ami, passé l’enfance et l’adolescence, ce n’est plus aussi important dans nos vies. On est encouragé à se marier, à faire des enfants, à réussir sa carrière, on est poussé à passer du temps en couple, mais jamais avec des amis. L’amitié n’a aucun poids légal : si un ami meurt, pas de jours d’arrêt, pas d’espace pour pleurer. On parle rarement des deuils amicaux, des ruptures amicales, de ce lien si précieux que la souffrance peut être difficile à vivre lorsqu’il se rompt.
Bien des passages m’ont fait découvrir cet aspect dont je ne réalisais pas la portée, étant de mon côté très « ami.es » et leur laissant une grande place dans ma vie.
Revendiquer l’amitié est entre ces pages un acte politique pourtant intimiste, une force et une liberté sans limites. À travers des entretiens, des œuvres de littérature et des études sociologiques, Alice Raybaud permet de penser la société autrement que sous le seul éclairage familial. Elle inclut entre ses pages les personnes queers, racisées, les hommes, les femmes, les couples, élargissant les possibles, comme vieillir ensemble, et respectant les manières de vivre de chacun.
Je ne peux que vous conseiller ce livre, vous dire de le lire absolument. Il fait du bien.
Bien des passages m’ont fait découvrir cet aspect dont je ne réalisais pas la portée, étant de mon côté très « ami.es » et leur laissant une grande place dans ma vie.
Il suffit de penser à la douleur que peut engendrer une rupture amicale pour saisir l’empreinte qu’elle laisse sur nos vies, bien que ces deuils-là n’aient que peu intéressé les auteurs et autrices de fictions. Et qu’il n’y ait généralement personne pour venir nous consoler avec un gigantesque pot de crème glacée lorsque nous perdons un•e ami•e.
De fait, mettre le couple romantique au-dessus de tout, comme nous l’exhorte la société, nous appauvrit socialement. Ce n’est pas une lubie de ma part : la mise en ménage est « la principale cause de déclin des amitiés », quand ce n’est pas de leur disparition, a pu démontrer la sociologue Claire Bidart.
Conversation avec Amélie Nothomb
Autant j’adore l’écouter parler (et la regarder en même temps), autant là je ne sais pas si ça tient aux questions (pas très futées, ou disons assez redondantes avec ce qui a pu être dit dans mille vidéos) ou au format simpliste et rapide, mais je me suis passablement ennuyée. Les questions sont écrites en caractère immense, ce qui alourdit au passage le livret (80 pages, comment appeler ça autrement). Et les réponses ne sont pas creusées, on reste donc en surface et à Paris.
On retrouve l’esprit de l’autrice, mais ça s’arrête là.


Résister à la culpabilisation – Mona Chollet
Comme d’habitude avec cette autrice, il y a du bon et du mauvais dans son livre. Ce côté intéressant se noie dans une grande généralité. Je l’ai apprécié, je suis contente de l’avoir lu, mais finalement elle se contente de copier-coller ce que d’autres (en général anglo-saxons) ont écrit avant elle (sans forcément avoir été traduits). Étrangement elle sort toujours de son thème avant d’y revenir plus loin, sans lien aucun, survolant de fait son sujet ; cela me donne la sensation d’un esprit qui part dans tous les sens.
Je pense ce livre davantage comme un témoignage personnel qu’un essai. À lire pour le plaisir, sans en attendre trop, même s’il a le mérite d’être intéressant si on n’a rien lu avant du sujet.
Les humilié.es : 10 ans après le mariage pour tous, l’heure du bilan – Rozenn Le Carboulec
Je l’ai lu avec recul (sa colère, très légitime, m’était difficile le jour où je l’ai lu). Le propos se perd parfois un peu mais est essentiellement très pertinent. L’autrice revient sur les faits politiques, les phrases entendues dans les manifestations, les propos de politiciens trop mous ou trop laids, les débats homophobes et lesbophobes, la PMA et le Pacs. Je n’ai pas appris beaucoup de choses, à part entre autre (et ça passe mal) l’abandon pur et simple de Christiane Taubira à côté duquel j’étais complètement passée.
Essai indispensable, à l’écriture parfois à revoir.


Before the Crown – Flora Harding
Ayant beaucoup apprécié la série The Crown notamment pour son côté historique, je me suis lancée dans ce roman. Erreur. C’est mal écrit, le style est fade et on s’ennuie à mourir. Il ne se passe franchement rien et c’est assez triste d’imaginer que c’était sans doute le quotidien de la future reine, ce rien. Après je ne suis pas friande des histoires romanesques, mais celle-ci en manque cruellement, ce qui est presque paradoxal. J’ai terminé en diagonale, le désintérêt reste le même à la fin du bouquin.
Avec un petit côté voyeuriste en prime, le livre n’est vraiment pas bon.
La huitième vie – Nino Haratischwili
Un livre encensé, adoré, dont tout le monde parle, et qui m’a laissée totalement perplexe face à cet engouement. Près de 1200 pages historiques et géopolitiques sans attraits avec vaguement autour, des personnages même pas sympathiques, des pages écrites sans respiration et quasiment sans chapitre (il y en a 7), dans une police d’écriture minuscule. Là où habituellement l’Histoire me passionne (peu importe le pays), ici je me suis ennuyée comme rarement, noyée par des dates et des personnages inconnus, le tout proprement indigeste.
Des semaines à m’y ennuyer, à le poser, le reprendre, le reposer, le reprendre… si bien que j’ai accéléré pour une lecture en diagonale avec en conclusion un « tout ça pour ça » agacé. Les descriptions n’en finissent plus, ne savent pas se mêler à l’histoire des femmes et des hommes que l’on suit.

Cette famille de chocolatier est plus un à côté dramatique pour démontrer l’enfer de cette période en Géorgie, qu’une véritable saga. Je ne me suis attachée à personne tant c’est froid, distant : l’écriture sert un style journalistique, voire un « livre d’Histoire », c’est très documenté (ce que j’aime tant habituellement). Le travail de recherches est parfait, vraiment, mais ça n’en fait pas un roman intéressant, il manque une étincelle, quelque chose qui accroche.
Un fiasco pour moi, une réussite pour d’autres…

Murtagh – Christopher Paolini (tome 5 d’Eragon)
Comment rester polie ? Le livre donne l’impression d’avoir été écrit par un jeune ado (ce qui serait pardonnable du coup, et juste de la maladresse à travailler). Qu’est-ce que c’est que ce bouquin ? Rarement vu un livre aussi mauvais. L’histoire est creuse, le style d’écriture est de plus en plus catastrophique au fil de la lecture, les rebondissements sont prévisibles et même pas intéressants, Murtagh s’apitoie sans cesse alors qu’il ne fait que prendre des décisions idiotes, le dragon est quasi invisible et jamais écouté, et là ça m’a mise en colère, il semble qu’on dépasse un trauma avec des « si tu veux tu peux ». Vraiment ? Connard (la politesse, c’est surfait finalement).
Une demi-étoile ajoutée pour la couverture et son dragon.
Mon assassin – Daniel Pennac
J’ai lu ce livre avec à la fois une très grande joie et une toute aussi grande perplexité. D’un côté on entre dans l’inspiration pure des Malaussène, ses proches, son éditrice, c’est un régal grâce à son écriture toujours aussi touchante et particulière (c’est fou comme son écriture est reconnaissable entre toutes). On touche au journal un peu intime. De l’autre côté, c’est parsemé de morceaux de l’assassin, l’enfance qui n’en est pas vraiment une, j’ai adoré. J’ai pourtant été désarçonnée par la fin, qui n’en est pas une non plus. Un peu comme s’il manquait quelque chose, on tourne la page et ce n’est pas là.
Ce livre est décousu, je pense que c’est le terme adapté.

J’ai l’impression, vraiment, de devenir méchante dans mes critiques (Murtagh est un cas à part sur lequel je ne reviendrai pas, il y a des sujets sur lesquels je suis chatouilleuse). La faute en revient en partie à l’accumulation de titres pas formidables, et à mon excès d’agacements petits et grands qui s’ajoutent à mes journées, j’imagine.
Retenez de tout ça qu’il faut lire absolument Nos puissantes amitiés et Les humilié.es, jetez le reste (gardez Pennac, quand même).
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Ce n’est pas parce que tu es critique que tu es méchante. Exigeante, oui, mais comment ne pas l’être quand on consacre tant d’heures à la lecture, et qu’il faut faire confiance a priori, sans garantie autre qu’une recommandation ou un nom ?
Lire ces critiques était d’autant plus intéressant pour moi qu’une fois n’est pas coutume, j’ai lu deux des essais listés. J’ai été un peu moins emballée que toi par Nos puissantes amitiés — probablement parce que j’aimerais une exploration de la dimension intime de l’amitié, plus que de sa dimension politique— et un peu plus par Résister à la culpabilisation — probablement parce que j’abandonne volontiers un essai bien structuré par un essay à l’américaine, plein de réflexions et anecdotes personnelles. Je n’avais pas perçu qu’elle sortait de son thème pour y revenir, mais ça me fait prendre conscience de ce que l’analyse politique/sociologique prend souvent le pas sur la dimension psychologique (qui nous touche peut-être davantage ?).
Un peu curieuse de ce Pennac aussi, je regarderai s’il est à la médiathèque.
C’est très juste. J’ai juste beaucoup de mal à dire les choses négatives, surtout quand je sais que potentiellement (pas sur mon blog mais l’idée y est) l’auteur·rice peut lire ce que je dis et s’y blesser. J’imagine que lorsqu’on est publié il faut savoir s’exposer aux critiques mais dans les faits c’est toujours plus compliqué. Des années que je lisse mes propos sur les ouvrages que je lis (c’est-à-dire que je travaille à rendre le négatif acceptable à recevoir), et je fatigue, je crois.
Je te rejoins pour Nos puissantes amitiés, il m’a fallu recalibrer mon attente très vite en cours de lecture. Un jour peut-être ? J’aimerais.
Résister à la culpabilisation m’a tout de même plu, mais c’est vrai que je commence à soupirer sur sa vulgarisation et ses égarements. Et que mes lectures d’elle sont désormais teintées de ça. Je l’apprécie, je lirai ses suivants, « mais ». Je n’avais pas réalisé que ça avait un côté américain ^^ (en effet) et ça, ça ne me dérange pas, au contraire même je dirais. La dimension psychologique me touche en tout cas, oui, davantage (si elle est bien liée au sujet).
Il y a des saisons, je trouve, où aucune lecture n’accroche. L’auteur en publiant prend le risque de déplaire et même si ce n’est pas simple de lire une critique négative sur ce que nous avons pu écrire, on doit s’y préparer à un moment ou à un autre. Et le lecteur a le droit d’avoir son avis aussi.
Je n’ai lu aucun des titres mais j’ai été tentée par « Résister à la culpabilisation » – ce que je crains avec ce type d’essai c’est la redondance des idées et finalement ne rien en sortir de concret.
Je suis bien d’accord… pas facile à appliquer, mais c’est vrai.
Il gagne à être lu si tu n’as pas déjà abordé ce sujet avec d’autres livres pas encore traduits. Je n’ai pas eu la sensation de ressortir avec du concret, plutôt d’avoir réfléchi à plein de choses. C’est déjà intéressant en soi.