En arrivant en Espagne, j’ai eu la mauvaise surprise de constater que mon forfait téléphonique ne passait pas la frontière. Blanche m’avait commandé des photos que je devais envoyer tous les jours, je n’ai pas pu honorer sa demande. Je n’en ai donc fait aucune avec le téléphone ce jour-là, puisque je ne pouvais partager avec personne – à quoi ça tient.
J’ai donc utilisé seulement le vrai appareil. Je crois que le voyage m’a un peu réconcilié avec lui, même si nous avons toujours des bizarreries de compatibilité, lui et moi. Disons qu’au moins, j’ai amélioré ma compréhension de sa zone de netteté, malgré encore quelques ratages de temps à autre.

je devrais dessiner par-dessus, tout ce que je vois
LeChat travaillant beaucoup trop pour son bien, je me suis occupée de nos vacances et j’ai choisi chacun des sites sur lesquels nous avons posé le pied. Gaztelugatxe m’a attirée pour sa beauté, mais aussi parce qu’il y était question de Game of Thrones – je ne résiste pas à Game of Thrones. Et franchement ? On imagine sans mal les dragons dans ce ciel immense.
Nous avions pris rendez-vous avec le lieu un mois auparavant. Il faut savoir qu’en Espagne, les lieux très touristiques sont gérés sur internet, bloquant ainsi l’accès à trop de tourisme – la protection du lieu avant tout. Si le principe est pertinent, la chose en elle-même m’a rendue un peu folle, sincèrement. Ils veulent connaitre les noms des gens, mais aussi les prénoms, le sexe, l’adresse postale, l’adresse mail et le numéro d’identification de la carte d’identité, multiplié par quatre dans notre cas. Sachant que le genre est ici autre chose que celui assigné et que nous n’avions pas la carte d’identité de Chouette, c’était à tout le moins épique – je crois que je déteste l’administratif.
On choisit le jour et l’heure (13h30), et on ne doit pas être en retard. En avance non plus, d’ailleurs. Il se trouve que l’horaire que je prends un peu par calcul un peu par hasard, est parfait : à l’heure du repas espagnol, il y a moins de monde. Nous venions de France avec trois heures trente de route (plus les arrêts, plus le repas à intégrer), l’estimation n’était pas évidente d’autant que nous devions inclure de trouver une place sur le parking (ils suggèrent de prendre un train ou un bus depuis je ne sais plus quelle ville (Bilbao ?), parce que le parking est surchargé et donc peu praticable). Au final, nous avons trouvé une place facilement malgré un parking effectivement plein à craquer : une voiture est partie sous notre nez. Nous sommes arrivés à la « barrière » avec vingt minutes d’avance, ce qui m’a laissé tout loisir de traduire les mots de la gardienne du lieu, désespérée de ne pas se faire comprendre d’une touriste française qui ne parlait aucune autre langue. J’ai traduit qu’il fallait réserver sur internet, que c’était complet, mais qu’elle pouvait revenir vers 14h parce qu’il y avait peu de monde (quelques désistements). Le tout en anglais vs français (aidée par une première écoute en anglais pour nous, puis d’autres, avant cette dame). Fière. Je suis toujours incapable de l’inverse, mais au moins dans ce sens je m’en sors un peu mieux.
Notre heure est enfin celle du papier que nous avons en main, nous pouvons avancer : à moi Peyredragon.
Nous descendons une pente arborisée avec la sensation d’entrer dans une forêt luxuriante. La végétation est magnifique, je m’arrête à chaque pas observer une plante ou une petite bête. Sur certains sites ils abusent en disant qu’on met 10 minutes pour atteindre le site, de notre côté on a abusé en mettant une heure ^^ (je dirais qu’il faut bien 20 minutes aller et 25 minutes (ça grimpe, du coup) au retour, en marche normale-rapide). Après, les gens ont le droit de tracer sans rien regarder autour d’eux, c’est sûr. Et de ne pas avoir besoin de s’asseoir, aussi. Nous avons mis également une heure pour remonter, mais cette fois ce n’était pas pour observer le vivant : j’étais épuisée et je devais m’asseoir tout le temps.
La météo est mitigée. Globalement grise, chargée, un peu lourde même parfois, il y a pourtant une apparition du soleil à intervalles réguliers : nous repartirons tous avec un léger coup de soleil, trois nez et une nuque rougis.




Tout est prétexte à photo, nous n’avançons pas beaucoup. J’ai l’impression d’être une exploratrice, je dois répertorier la moindre particule de cette forêt, évidence. Je plonge, yeux grands ouverts.






Tant de beauté…
Je pourrais rester là des heures, à errer d’un brin d’herbe à un bout d’écorce, saoulée de fatigue et de verdure jusqu’à l’éclat de rire. Je me ressource, je respire à plein poumon la sérénité d’un lieu pourtant extrêmement surchargé d’humains – mais borné de barrières, ils ne marchent sur aucune racine, n’arrachent aucune feuille, ne grimpent dans aucune branche. La forêt est accueillante, une certaine joie court entre les arbres. Ça n’empêche pas quelques incivilités, ceci dit.

J’admire la faune locale, aussi. Comme si je n’avais pas les mêmes à la maison ; je m’extasie comme une enfant.

– frelon asiatique –





– tu crois qu’il sait que je ne parle pas sa langue ? –

Et puis malgré moi sans doute, nous approchons. L’îlot qui n’en est pas un, se devine. Il fait toujours aussi gris, mais on est bien. On a même retiré nos pulls.
Sinon, de temps à autre, j’ai une certaine tendance à pencher à gauche. Il semble. Dans la vie.
Mon horizon bascule – la fatigue. Je suis trop debout, trop statique, là où je devrais marcher, mais est-ce qu’il est possible d’expérimenter une vie uniquement en mouvement (ma réponse est résolument non).




On aperçoit le célèbre escalier, 241 marches en zigzag. J’ai voulu compter, je me suis mélangé au premier lézard venu, j’ai retenté au retour et le résultat fut le même. Je fais confiance aux gens donc, ils doivent savoir. La deux centième est numérotée, j’ai recompté à partir de là et il y avait bien 41 marches au-dessus, de cela je peux témoigner.
Ce n’est pas ma faute s’il y avait trois tonnes de lézards et des surprises sur le parcours. Comme l’empreinte du pied de Saint-Jean Baptiste, sur laquelle il faudrait marcher pour que cela nous porte chance (j’ai raté ma photo… un signe ?). Le site est un lieu de pèlerinage. Et d’ancienne piraterie. Et de quelques légendes. Et de grottes. Et de souterrains cachés. Une dinguerie.










Je réussis des photos des enfants absolument superbes, qui me ravissent. Cet appareil photo décidément, réussit les portraits (d’accord, moi aussi). Chouette est plus difficile à attraper, petit feu follet qui préfère éviter l’appareil photo. J’en ai de belles, mais pas exposables. Et comme essentiellement elle a fait la visite sans nous (nous prenions trop de temps sur chaque caillou et brin d’herbe, je crois), je n’ai pas réussi à l’avoir de dos.


Le lieu est splendide, il pourrait nourrir la littérature rien qu’avec ses grottes et son ciel immense, je comprends aisément le choix de HBO pour Game of Thrones. Un dragon plane forcément au-dessus de nous, il surveille.
Parfois le soleil apparait, jetant une lumière intense sur les roches et offrant des couleurs impressionnantes à l’océan.





Où qu’on se tourne des rochers affleurent, créant des paysages uniques et intenses. Depuis tout là-haut, il ne ferait pas bon tomber, et pourtant c’est sublime. D’ailleurs contempler cet abîme – le vide m’attire, m’a toujours attirée – m’a fait songer qu’il devait être facile, fut un temps, de faire disparaitre des personnes indésirables – quand il n’y a plus eut les dragons, en tout cas.










Ça n’a pas l’air, comme ça. Mais je n’ai pas posté toutes les photos que j’ai prises ; je le promets j’ai fait un choix, parfois difficile d’ailleurs. Le lieu était magique. Nous y sommes restés plusieurs heures à observer le vivant, les pierres, l’océan, à nous immerger dans des sensations venues de très loin.
Le blog n’arrive plus à gérer la longueur de l’article (ou le poids des photos) (ou les deux) (il plante sans cesse), je m’arrête donc là, non sans vous laisser tout de même, avec le dernier des dragons – rassurez-moi, dites-moi que je ne suis pas la seule à le voir.

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« Au final, nous avons trouvé une place facilement malgré un parking effectivement plein à craquer : une voiture est partie sous notre nez. »
Quelle chance ! Vous semblez disposer du même pouvoir que Ubik : il trouve toujours une place. Ça me rend dingue 😛
Waouh tu gères l’appareil photo, tes photos d’insectes sont incroyables !
« Une dinguerie » 😀 Je vais rien dire, je dis « genre » et même « wesh » des fois 😀
J’aime les photos où l’on voit ta famille, j’espère avoir l’occasion de vous rencontrer un jour ♥
Il est magnifique, ce dragon. Je ne sais pas dire si cette photo me bouleverse ou me rassérène.
Voilà qui va te rendre encore plus dingue, sans doute, alors : très exactement, une place s’est libérée devant nous, il s’est garé, mais ça ne me plaisait pas parce que nous étions dans le passage, frôlés par toutes les voitures. Je me dis qu’ailleurs quand même, ça serait mieux… Je sors de la voiture et là, à ma gauche, bien protégée, une autre place se libère ^^ (qu’il a prise, du coup). Vala vala 😀
Merci 🙂
Dinguerie est un mot que j’aime beaucoup il exprime comme un sursaut pailleté et intense, il est parfait 😛
Mais oui j’espère bien ! Ça se fera forcément, d’une manière ou d’une autre <3
Tellement. Tellement les deux. Sur les lieux j’étais bouleversée, et aucun des trois autres ne voyait ce dragon, c’était incompréhensible pour moi.
Les photos sont magnifiques et je comprends cette nécessité de s’arrêter sur chaque merveille du chemin – mon fils déteste quand je fais ça mais je ne peux pas m’en empêcher!
Et tous ces visages de roche croisés…oui ça a un côté magie…
J’ai de la chance, mari et enfants me laissent complètement faire sans râler ^^’
Très jolie balade ! si je vois un gros lézard plutôt qu’un dragon, ça compte ?
Par contre, tous les lieux, il faut réserver à l’avance, s’inscrire et tout ça, ça me soule ! ça ne laisse plus aucune place à la spontanéité et je trouve ça vraiment dommage…
Humph, tu vexes un peu tous les dragons, ce n’est jamais une bonne idée de vexer un dragon -_-
J’oscille entre consternation parce que la spontanéité en effet, et compréhension parce que les sites se font malmener sévèrement par le passage des touristes. Je me dis que ça serait bien pire s’ils devaient en arriver à fermer un lieu trop dégradé. Mais oui, ce n’est pas agréable.
Oui, c’est clair que je comprends pourquoi ils sont obligés de faire ça, et quelque part, c’est vrai triste d’en arriver là