– dimanche 13 juillet –
Je m’attends à un concert sympathique, dynamique (j’ai visionné beaucoup d’interviews de la dame, je cerne un peu le personnage), jeune et intéressant. Je pense pouvoir dire que j’apprécie surtout la femme qu’elle est. J’ai conscience que ces chansons sont très accessibles voire relativement simples (je connais pour beaucoup les paroles par coeur, qui reviennent et reviennent encore), j’en apprécie l’essentiel. Elles sont assez répétitives et pourtant je les aime ce n’est pas explicable : ça va être un chouette moment avec une artiste qui débute. J’ai même regardé quelques bouts de concerts précédents, ça va être génial.
Je suis en dessous de tout.
Le public réuni débute vers les 5/6 ans jusque vers les 70 ans facile, ce qui est déjà ma première surprise. Seulement trois enfants (visibles par moi) ont un casque pour se protéger les oreilles, les autres se prennent de plein fouet la mi-surdité de chaque côté de la scène (j’en garderai un acouphène plus de 24 heures après le concert). Les plus jeunes sont les premiers à danser, chanter les paroles, crier : l’extase pure (adorable). Difficile de faire une moyenne d’âge, mais il semble que le plus gros est dans la tranche trente-cinquante ans.
Le concert débute à la nuit. La scène se pare de bleu, la dame se fait un peu attendre.
J’ai voulu filmer l’arrivée sur scène (une lubie) de Zaho de Sagazan mais si l’appareil de Kira en est certes capable, je découvre qu’il n’est par contre pas en mesure de le gérer de manière optimale : le niveau de la batterie chute toutes les trois secondes. Je prends peur au bout de douze et j’arrête, j’ai enregistré les premières notes et elle n’est pas là, si je continue je n’aurai plus rien, ni l’entrée ni des photos. Je me rattrape comme je peux avec une photo qui refuse la mise au point et qui a pourtant un charme fou. Elle entre dans un flou artistique, sombre et auréolée d’espoir.
Je fais assez peu de photos de toute façon, je profite et plonge.

Nous débutons avec Aspirations, dans une ambiance noire et bleue, électrique, et je suis frappée par son aisance scénique. Peut-être parce que la chanson m’est devenue à l’oreille, au fil du temps, un classique de l’artiste, je me coule doucement dans le concert, je connais les paroles, c’est simple. Simple et pourtant déjà obsédant. Il y a dans ses chansons une répétition qui entraine le cerveau, le corps, les pensées et je danse assise sur la première spirale, déjà limitée par l’exiguïté du lieu. Elle le dit, il s’agit d’un voyage et j’embarque parce que la musique, parce que ma sensibilité, je pourrais danser une vie entière et s’il n’y avait personne derrière moi je serais debout durant deux heures à ne tenir aucun compte de mes limites – à quoi ça sert d’être là sinon.

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La scène est un peu austère, même le piano est découpé d’une manière industrielle, étrange triangle poussé dans un coin. Le jeu de lumières rend pourtant l’ensemble esthétique et touchant, changeant d’aspects et de couleurs à chaque chanson. Je suis très sensible aux atmosphères et c’est une réussite – que l’appareil photo rate beaucoup, il fait sombre et je ne sais pas m’en servir et je n’ai pas envie d’y perdre mon temps. Jeune femme joyeuse et bondissante, l’attraper est une gageure : elle est souvent floue. L’appareil reste donc globalement sagement à mes pieds, là n’est plus l’essentiel.
Elle parle beaucoup, ce qui ne cesse de m’étonner et me sort d’un état proche de la transe – j’ai un rapport à la musique assez particulier. J’aime sa voix grave, envoûtante, je me laisse porter. d’abord par les musiques ensuite par les mots qu’elle délivre généreusement sur son enfance.
« Ma prochaine chanson contient comme toutes les autres beaucoup de fois le mot amour, mais ne parle pas une seule seconde… d’amour » dit-elle, si je me souviens correctement, en préambule de « Les dormantes » et c’est avec des larmes dans la gorge que je chante avec elle – pourquoi là alors que d’habitude, non ? Le concert est un lieu particulier où des liens se créent, une osmose folle comme des filaments allant de chaque personne à l’artiste, je ne saurais pas le décrire. Les émotions de la chanteuse filtrent, entre intimité et partage très généreux.
La scène plonge dans le noir, déployant des sons étranges, avant de se rallumer sur un unique spot orienté sur le piano où Zaho s’est assise et entame Dis-moi que tu m’aimes. Dans le public un homme lui hurle plusieurs fois qu’il l’aime et la chanteuse lui répond je ne te crois toujours pas, dis-le-moi encore dis-le moi, il faut répéter pour que ça rentre, on dirait un jeu parfaitement orchestré alors qu’il est parfaitement improvisé – et extrêmement touchant – , que la musique elle-même envoutante semble capturer.



Est-ce que tu vas bien ? me met les larmes aux yeux, de multiples échos explosent sous mon cerveau malmené émotionnellement ces derniers temps peut-être parce que je ne sais pas si je vais bien mais que là, tout de suite, je peux au moins répondre que oui, je vais, et ce jusqu’au bout du monde. Et lorsqu’elle lance Tristesse, je danse danse danse et pourtant je suis toujours assise pour ne pas gêner derrière-moi, je chante et sûrement pas l’inverse en chœur avec tout le monde, l’ambiance semble être à son comble alors qu’elle ne l’est pas encore, Ô travers est tout autant électrique si ce n’est plus et on pourrait croire, alors qu’elle parle avant de chanter La symphonie des éclairs, que ça va calmer le tout. Loin de là, elle captive par ses mots et ses larmes et La symphonie est reprise par tous. Elle sort de scène tout en chantant, prend des selfies, attrape des mains, prend le temps une personne après l’autre, grimpe à trois mètres de moi dans les gradins (quand je dis jeune femme bondissante, j’insiste sur l’image, elle saute par-dessus la rambarde), c’est complètement dingue, je suis dans la partie juste au-dessus d’elle. Sur cette photo prise sur le compte de Zaho, je suis très étonnamment et peut-être bien… dans le coin en haut à gauche de la photo, à côté de LeChat (chemise blanche) (ne vous abimez pas les yeux, on ne voit rien, et je ne suis même pas certaine de ce que je vois mais on était juste là). La femme était extatique et sautait partout ensuite ^^

Lorsque sur Ne te regarde pas, elle dit « je crois qu’ils n’ont pas compris notre chanson » je sais et je me lève, je suis la seule et je m’en fous je n’en peux plus d’être assise et lentement elle fait monter la pression, l’électronique nous submerge, les gens peinent à se lever malgré l’ambiance plutôt explosive bien en place, elle attend, elle soulève, les gens se lèvent petit à petit dans les gradins mais pas partout et je ne sais pas si c’est parce que je me suis levée et que je bouge sous les sons étonnants et dissonants mais de notre côté tout l’îlot est finalement debout et dans la fosse l’ambiance est folle, je bouge lentement et de plus en plus, j’ai l’impression que tout le monde gesticule (mais LeChat m’assure que notre ilot n’était pas représentatif de l’ensemble et qu’à d’autres endroits les gens n’ont pas bougés, mais comment font-ils ?) alors pour moi la salle entière est debout et bouge son corps sur des accords électroniques qui se trainent, semblent tirer les corps vers la musique, nous entrainent, pour finalement se faire complètement dépasser par ces personnes qui dansent, sautent, n’existent plus que pour cet instant… elle captive la foule dans une impulsion vibrante. Je danse si loin, je déconnecte et lorsque je reviens j’ai un moment de flottement, j’ai lâché mon corps et c’était incroyablement lumineux. Sensation d’être entrée en transe.
Peut-être ce live sera-t-il plus parlant, les mots peinent peut-être à exprimer ce mouvement très fort :
Elle enchaîne avec Hab Sex et Dansez, soulevant la foule à nouveau, plus personne n’est assis, nous dansons sur place, mes jambes hurlent de douleur et je m’en fous. Elle dit « personne ne vous voit, dansez » et elle ment largement, des spots de lumière nous éclairent en rythme dans les gradins et nous montrent chacun, en train de danser, et pourtant nous sommes vraiment seuls ou alors c’est seulement moi et ma facilité à m’extraire, je danse et je suis seule au monde pour la vie entière.

La fin du concert se profile et c’est une expérience étrange que de redescendre en soi. Zaho chante Ah que la vie est belle de Brigitte Fontaine. Elle passe dans le public comme la première fois, des selfies des mains tendues attrapées, elle monte les gradins à trois mètres de moi et cette fois je croise son regard – l’importance est plus pour moi que pour elle, c’est fou comme il y a une bascule comme la joie n’est pas la même de part et d’autre – j’ai un sourire qui vaut mille étoiles. Et là elle nous scotche tous, elle avance au milieu des personnes debout, le service de sécurité lui court après, elle chante que la vie est belle et fait des câlins à tout le monde, elle fonce dans la fosse et recommence, chant selfies mains tendues attrapées câlins pendant un temps infini puis elle s’envole, toujours bondissante vers les gradins d’en face où des personnes en fauteuil roulant sont installées et un homme en fauteuil se lève et j’ai un élan immense vers lui de reconnaissance et gratitude pour ce geste devant 13000 personnes – oui on peut être en fauteuil et marcher – l’identification est forte, ils font un long long câlin ensemble et elle va ensuite vers chaque personne en fauteuil, repart en bondissant et en chantant pendant que son service de sécurité court – je prends un fou rire – et que sur la scène, se lèvent des pancartes des paroles chantées, tenues par son staff et le groupe Pamela qui semblent tous bien s’éclater.


Lorsqu’elle quitte la scène, ils font tous un selfie en tournant le dos à la foule, et j’adore ce clin d’oeil, cette photo très dans l’air du temps souvent récriée par nombre d’artistes (qui ne supportent plus de voir non des visages mais des téléphones levés), une artiste jeune très dans son époque, forcément.
J’ai assisté à un concert intimiste, généreux et unique. Les chansons sont certes simples, mais leur aspect répétitif et la musique envoutante fonctionnent au-delà de ce qu’on pourrait imaginer. Il y a quelques maladresses que son enthousiasme rattrapent sans peine, mais surtout elle a une diction absolument parfaite (pardon Mylène). Je ne m’attendais pas à danser autant (à presque me questionner sur la pertinence de ne pas être en fosse) et encore moins à m’échapper comme ça, je ne sais où : j’ai rencontré une femme aussi incroyable que je le pressentais, et son concert est une dinguerie du style Rave-party.
Chouette m’a demandé, si elle fait d’autres concerts, tu retourneras la voir ? ; cela dépendra de la suite de ses albums, mais oui, et avec un plaisir rare !
Partages :
. Presse : Midi Libre (beaucoup de très belles photos dans le carroussel)
. Blog : concert globalement identique chez Matoo, en 2024
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Oh c’est troublant de lire à quel point nous sommes synchros sur les émotions qui nous étreignent aux concerts de Zaho. J’ai passé de tels moments en suspension, et on y est allé deux fois ! 😉
Oui ça m’a amusée aussi ^^ C’était din.gue, je ne m’y attendais pas. Si planant et dansant…
Deux fois wow, je comprends 😀 La seconde fois doit donner une sacrée impulsion au corps et au mental..
Merci de m’avoir fait revivre des émotions que j’ai vécues fin d’année dernière en la voyant ! Les bascules d’énergies électriques mêlées à l’humanité si évidente – c’est un mélange fabuleux et c’est tout ce que j’espérais pour toi quand tu m’as dit y aller <3
Je suis heureuse que cela t’ait fait revivre le concert, toutes les énergies positives sont bonnes à prendre 😀
Je dois dire que tu m’en avais touché deux mots, mais je ne m’attendais malgré tout pas du tout à ça !
« Ne te regarde pas »… Combien est-on en réalité à avoir besoin qu’on nous le dise, et comment cette fille du haut de ses vingt-six ans fait-elle pour me l’apprendre avec une telle fièvre ?
(hum certes Eliness me le répète depuis un bout, mais, comment dire ? Les spotlights et la foule, ça aide, étonnamment :D)
LA grande question ^^ Perso je l’ai appris avant, pour la danse ; une histoire de mariage et de perte d’emploi mêlés qui ont eu un effet détonnant sur moi (je dois juste l’appliquer au reste de ma vie ah ah XD )
Hé hé merci Eliness 🙂 mais oui, je ne sais pas pourquoi ça aide, mais ça aide ^^
J’espère qu’il me viendra en la regardant, ce lâcher-prise 🙂
<3