Jeudi 13
Nous sommes sur la route vers la gare lorsque le téléphone de LeChat sonne. Je n’aime pas, en voiture. Comme il est indiqué « médiathèque » je décroche pendant qu’il conduit. Je suis surprise d’entendre la vidéothécaire, je revois en accéléré les ouvrages rendus et je suis certaine de n’avoir rien abîmé… quelle erreur ai-je bien pu commettre ?
Et elle m’explique.
Le livre Arcane est arrivé à l’emprunt, elle me l’a mis en priorité en réservation : grâce à elle, je serai la première à le lire et c’est inexplicable comme ça me rend folle de joie ! (en fait dans l’enthousiasme j’ai mal compris, il va arriver bientôt à l’emprunt et je suis la première donc, puisqu’elle m’y a inscrit d’office). Limite si elle ne s’excuse pas du geste, alors que moi je pourrais lui offrir un cheesecake juste par adoration pure.
Et second point, et non le moindre, deux des concepteurs vont être en dédicace à Montpellier le 19 février !
Elle est merveilleuse. Je suis certaine que nous pouvons devenir amies, il ne va pas manquer grand chose pour que ça arrive. De la patience, peut-être. Entre ses silences et les miens, de ce qu’il serait essentiel à partager mais que l’autisme étouffe des deux côtés, je crois qu’on va prendre les dix prochaines années. Work in progress.
La dédicace se tient le jour de mon retour de Paris, un grand moment de flottement me prend. Je ne sais pas l’heure des trains, mais surtout je ne suis pas sûre que se déplacer va être pertinent s’ils n’ont pas de livres à vendre. Il semble qu’il faille venir avec nos ouvrages ou même des figurines, ce qu’on veut… mais je n’ai rien. Après une réflexion intense, j’ai envie d’y aller même avec une feuille blanche, de me bousculer un peu plus encore sur mes routines, j’accepte donc de l’envisager.
Dès le premier train, mon sac, réparé la veille à grand renfort de fils, se déchire exactement au même endroit, à savoir les épaules. C’est exaspérant, un peu. J’ai un côté fataliste-fatigué. J’espère seulement qu’il va tenir la journée – et il tient.
Les trains s’enchaînent, sans retard malgré les seulement treize minutes d’attente entre ; c’est à Paris que ça va flotter, le RER ne bouge pas pendant 40 minutes, nous plaisantons beaucoup avec Blanche : nous sommes heureuses de nous retrouver, qu’importe le reste.
À l’arrivée je vois disparaître mon ordinateur dans les mains de Chouette, je ne sais pas à quel moment j’ai pensé que j’y aurais accès, disons, facilement. Je me rabats sur la prise de note par téléphone, mais je suis bien moins à l’aise. C’est un peu comme manger toute sa vie avec des fourchettes et se retrouver avec un jour entre les mains de jolies baguettes : c’est un apprentissage, jolies ou pas.
Je n’aime vraiment pas le téléphone, mais cette fois, si.

Vendredi 14
J’ai complètement oublié de réparer mon sac hier soir, évidemment. Blanche me fournit en fil et aiguille, je lui demande de rajouter une paire de ciseau et elle me regarde avec l’air de dire « parce que tu ne peux pas couper avec les dents ? ». Je suis civilisée, figurez-vous (en vrai, ce n’est juste pas quelque chose que je fais alors qu’elle ne s’embarrasse jamais de rien et qu’elle a raison).
Dans le sac, mon appareil photo, le zoom macro, deux boîtes de biscuits maison, quelques vêtements. Lorsque je pars, les filles dorment encore.
Le RER prévu a disparu dans des travaux inopinés, je change donc de trajet. Blanche m’accompagne un bout de chemin parce que je ne le connais pas. Nous descendons tellement d’escalators, l’elfe en moi se crispe – on n’a pas idée de creuser si loin sous terre, je cherche le balrog. Dans le métro 14, j’entends la voix du haut-parleur parler français (« veuillez ne rien laisser derrière vous dans le train s’il vous plaît » mais je n’ai pas vraiment écouté, c’était quelque chose de cet ordre), puis en anglais, puis en… japonais. J’ai la surprise de d’entendre et comprendre un mot, kudasai : s’il vous plaît. Il n’est pas forcément la formulation la plus adaptée, d’ailleurs, mais c’est la première fois qu’un mot me parvient dans cette langue et que je le comprends, ça me met dans une joie profonde. Une fausse impression de parler la langue qui est très satisfaisant pour le cerveau .
Dans le 13 la voix communique en français anglais espagnol. Je regrette le japonais.
C’est à Montparnasse que je rencontre la première de celles que j’espère en amitié. Nous sommes aux pieds de la tour immense et sans charme – il manque des arbres, de la verdure, des oiseaux, d’accord il manque la campagne, voilà. Le soleil est présent rien que pour nous, certes froid mais lumineux ; nous sommes chanceuses (il a plu la veille, il pleuvra dimanche). Je crois, je parle beaucoup.
Je garde la suite pour mon carnet papier, mais en cette journée j’ai eu la chance immense de rencontrer Kalys et Eliness, absolument merveilleuses. Je suis tombée en amitié profonde, émerveillée que cela puisse arriver. Que cela puisse m’arriver, à moi. Quand j’ai si naturellement fait fuir tant de monde parce qu’être moi était toujours trop, c’est extrêmement réparateur. L’instant présent est réparateur.
Nous mangeons dans une crêperie sympathique où nous nous apprivoisons en douceur. J’apprends l’une et l’autre, les gestes, les voix, les visages, elles prennent consistance – réalité. Troublant.
Je relaterai l’expo au Grand Palais de Chiharu Shiota que nous avons vue ensemble dans un autre article, mais ce fut intense. Tellement, j’aurais aimé en voir davantage.


Le soir, l’hôtel et la tour Eiffel nous bordent, et même elle pétille alors que nous partons nous coucher. J’ai bien sûr complètement oublié de réparer le sac, ça ne tient que par hasard, il faut vraiment que je fasse quelque chose mais je suis très fatiguée. Demain ?
Samedi 15

Au matin d’une nuit agitée et cauchemardesque (je ne connais pas le lieu, je ne dors pas, CQFD), je me lève avec le soleil et admire un lever où la tour Eiffel pose nonchalamment à côté. Je répare enfin le sac, une aiguille dans le tissu, une aiguille dans le doigt – à peu près. Enfin disons que vouloir pousser une aiguille dans une grosse épaisseur de tissu écharpe la peau avec enthousiasme.
Et au petit-déjeuner, les cookies.

Elle me demande « est-ce que ça va aller ? » et je n’ai pas le temps de réfléchir je réponds non et je suis la première étonnée, j’ai envoyé la réponse la moins socialement correcte (j’ai envie d’ajouter « de tout le séjour » mais comme justement je l’ai fait tout du long, alors, pffff). Mais dans les faits non, ça ne va pas, je sens que je me délite et j’ai commencé le travail d’effritage le jour où j’ai pris les billets pour voir ma famille. J’ai marché, je suis restée debout sans bouger, j’ai porté (et heureusement, pas tout le long puisqu’elles m’ont aidée), j’ai fragilisé ce qui ne tenait déjà plus bien, le fauteuil a manqué. Je suis étonnée que tout se soit si bien passé à l’intérieur et je crois, je le dois à la qualité des échanges, aux liens qui se créent en douce, à l’évidence de la rencontre, à l’amitié qui se noue. Aux fils qui ont rattrapés, tel un filet, celle que je suis.
Nous laissons malheureusement Kalys derrière nous, son train la récupère plus tôt, pendant qu’Eliness et moi partons vers Blanche, manger sur une péniche-librairie. Ma tante-marraine veut m’appeler alors que je suis dans le métro et le stress monte, je la rappelle à la sortie afin d’éliminer l’angoisse au plus vite. C’est détestable, ce stress, chaque fois. Je ne sais pas le poser, je ne sais pas regarder ma tante et n’être qu’indifférence. Un jour ? Je raccroche, soulagée. Tellement soulagée, je remonte sur tout le repas plus haut qu’avant l’appel. Si le psychologique n’est pas en jeu, il faut m’expliquer.
Elles se rencontrent, donc. L’amie en devenir et l’ancienne. Tout aussi beau que la veille, les conversations coulent d’elles-mêmes.
Lorsqu’Eliness repart, j’ai la sensation d’une promesse, peut-être. Nous avons existé quelques heures dans un ensemble qui ne porte pas encore de nom, merci tellement, à toutes les deux pour cette rencontre magnifique <3
Chez Gibert, je trouve un carnet de voyage (je ne vais pas changer en claquant des doigts) parlant de baobabs, un carnet vierge parce qu’il est magnifique (ce qui nous permet d’acheter le même, Blanche et moi, évidemment), puis dans le Gibert quelques pas plus loin je trouve deux concerts de Mylène Farmer, j’ai réussi à mettre la main dessus en occasion. Exactement, je demande au vendeur où elle se trouve, il me montre l’étagère avec un rire dans les yeux (pourquoi ?), et sourit franchement lorsqu’il me revoit passer plus tard avec quatre DVD dans les mains (j’ai aussi pris deux DVD de ces clips, oui, bon). Je n’ai aucune idée de ce qui lui a traversé l’esprit, mais j’aurais volontiers aimé qu’il partage ^^ – il m’a semblé ravi, c’était incongru.
La peur absolue d’avoir été « trop » durant ces deux jours m’attrape le soir, soudain je me dis que je me suis retrouvée là par erreur, que j’ai trop parlé, que j’ai manqué de filtres, le sentiment d’imposture m’écrase. Si nous avons une discussion passionnante avec Blanche sur les masques qu’on porte et ceux qu’on arrive à retirer (ou ceux comme moi, que je n’arrive pas à porter dès lors que je me sens en confiance), elle n’empêche pas la crise de panique, de nuit. J’ai forcément été « trop ». Trop moi.
Dimanche 16
Au réveil je revisite les deux derniers jours et prends conscience que
. je parle sans filtre et c’est trop sans doute
. je suis encore et encore enfermée dans des boîtes bien rangées et j’ai juste envie de trouver la bombe qui fera tout sauter, arrêter de bloquer sur ces boîtes de traumas en tiroirs.
Le premier point m’angoisse, je me replie dans le lit et panique complètement. Des larmes montent, ne coulent pas, l’angoisse reste au bord des yeux. La peur violente d’avoir été « trop ». Je ne sais pas me soigner de ça. Ni même me taire, cela non plus je ne sais pas. Je suis assez binaire finalement, taiseuse ou entière.
Lundi 17
J’écoute de la musique, je m’aperçois que je n’ai pas créé la playlist de février, que j’ai entassé sur janvier ce qui explique que je n’écoute plus toute la première partie depuis un moment.
J’écoute, j’écris, je lis, il y a ce bien-être intense d’être posée, assise, simplement occupée à réunir l’énergie vitale.
Et puis.
L’angoisse m’explose au visage, je lis qu’aux USA LGBT est en train de devenir LGB, les personnes trans sont effacées socialement, scientifiquement et historiquement, je suis effondrée. La tristesse et l’inquiètude me prend pour ell.eux, pour le monde, pour mes filles, dans cet ordre, c’est insupportable, je me prépare mentalement à une résistance qui ne portera un nom qu’avec le recul, la distance. Je suis effrayée de savoir mes filles fichées, effrayée de penser qu’un jour assez proche nous n’aurons peut-être plus accès aux hormones et alors il se passera quoi, une vague de suicides ? J’ai vu Kira s’enfoncer, avant l’accès… Je remets la musique, pour l’instant je n’ai que ça.
Autruche.
Mardi 18
Je vais mieux. L’énergie est de nouveau présente, jusqu’à ce que je décide de m’occuper de cette histoire d’Arcane et donc de changer les billets. Là, je voudrais juste tout annuler, c’est trop énergivore et ça m’agace que ça le soit. LeChat me signale que Kira ne demande jamais rien, et donc.. ça serait bien d’y aller.. Il a raison.
Lorsque je demande à la SNCF de rajouter Nîmes-Montpellier au billet qui jusque-là faisait Paris-Nîmes afin qu’il devienne Paris-Montpellier, trajet qui est donc depuis le même train, juste une gare plus loin, l’appli me dit d’accord ça fera 255€.
Ah. Non. On ne va pas procéder comme ça, donc.
Me voilà à jongler sur le net, à créer des billets avant de réaliser que non, j’ai déjà une partie du retour qui est payé et récupérable du trajet initial puisque les TER sont valables sur la journée, je recommence, plusieurs fois, j’en ai marre, je m’obstine et finis par posséder des billets dématérialisés. Qui n’existent donc absolument pas. Si on réfléchit.
De nouveau je vais bien, la complication a été maîtrisée, nous irons voir deux personnes pour obtenir des signatures qui n’ont aucune valeur réelle sinon celle qu’on leur donne, l’humain est incroyable. Je précise que je ne critique rien, je constate l’absurdité de la chose avec beaucoup de plaisir.
Nous avons failli emmener Lutin.e, mais outre le fait qu’iel est moins accro que nous à Arcane, la précipitation était trop angoissante et donc ingérable. On stoppe l’idée mais on l’accroche à un plus tard hypothétique.
Et puis. Je reçois des mots si puissants, je pleure. Une fois, puis deux (relecture). Il est difficile parfois de recevoir autant, je suis bouleversée. Je tente une réponse mais c’est tellement émotionnel je m’y mets en plusieurs fois, j’efface, j’écris, je rate, je reprends, ça me prend tellement de temps vient le moment de redonner mon pc à Chouette et mon message est un morceau de moi inachevé. Une heure passe et je réalise que je peux mettre la boîte mail de sur mon téléphone (je n’y ai que l’administrative). La manœuvre est simple, et désormais mon tél me prévient pour deux boîtes, même appli de mails capable de gérer les deux, elle est incroyablement parfaite. Je termine donc mon message mais je ne suis plus autant à l’aise, ce n’est pas mon élément et les mots me sont moins accessibles.
Mercredi 19 – Retour infernal
Le voyage est un calvaire. À la gare de Lyon, mon appli de paiement bloque la carte (par ma faute, j’ai retiré le téléphone parce que j’ai oublié de mettre le code, cela a été considéré comme un arrachage, donc comme un vol), je perds complètement pied, la vendeuse est désagréable au possible (c’est sa pire journée à elle aussi), je ne peux plus payer les sandwichs, je bloque sa caisse les gens derrière la gare la ville, je me tends essentiellement parce qu’elle n’est pas aimable et que j’ai besoin de cette nourriture pour là tout de suite. Je récupère, à l’extérieur du magasin – c’est ma troisième sortie sous le regard noir de la vendeuse – mon porte-feuille, je paye avec ce qu’il me reste de liquide (moins trente centimes au fond du fond), j’ai deux sandwichs sur trois (sinon c’est pas drôle) et rien pour payer la suite. Le téléphone reste bloqué, Blanche me passe des tickets-repas, je descend un peu côté stress et je réfléchis. À tout prendre, je redémarre le téléphone, et miracle, la CB est de nouveau dessus, je vais donc pour payer, ailleurs, le dernier repas prévu et là mon tel demande trois fois le code, se met en échec tout en me disant que oh j’ai bien payé 11€. Envie de passer le téléphone sous un train, tout autant que je suis soulagée de l’achat possible.
Je le redémarre, dans le doute.
Dans le train, je n’ai pas le son. Je le redémarre, ça semble être une solution à tout. Le son revient.
Je sens qu’il ne faudrait pas trop de problèmes sur ma route. Pourtant quand une femme à côté de moi se retrouve en difficulté, comme ce n’est pas moi, je le gère très bien. J’essaie de lui dénicher une solution avec mon téléphone, sans succès, finalement l’aide s’avère surtout psychologique (c’est important aussi, je crois). Un problème de train, ou bien de jour, ou bien de réservation, ou bien du site lui-même, et même le contrôleur décide qu’il vaut mieux lâcher l’affaire et faire comme s’il n’avait rien vu.
Une femme crie « Vous ne touchez pas à ma poussette » et fait taire tout le wagon qui se fige comme si sa vie en dépendait. Un homme mange son repas avec des baguettes (j’adore). Devant nous, trois enfants en bas âge pourrissent, en hurlant et en claquant violemment les tablettes, l’espace sonore de tout le wagon. Parfois la mère dit non, mais les enfants n’en tiennent aucun compte, c’est insupportable. Derrière, un bébé hurle beaucoup aussi, mais lui c’est un bébé. Nous sommes coincés entre deux sons épuisants. Mon casque ne filtre pas tout, et Kira ne supporte plus le sien, elle subit et s’effondre. Elle parle à peine.
À Montpellier, je demande mon chemin à la police ferroviaire. Il est revêche mais efficace, me parle même d’une appli pour simplifier, et surtout « n’achetez pas à l’avance, le billet se valide dès l’achat ». Damned.
Les machines ne prennent que le liquide (ah ah) et la carte bleue physique (idem), je télécharge donc l’appli, merci monsieur. J’ai une pensée pour les personnes qui vont de villes en villes, par exemple pour le travail, et qui doivent installer une appli par ville – l’enfer. Mon téléphone freeze au moment de rentrer les codes de la CB. Je redémarre – au point où j’en suis. Ça fonctionne. J’achète trois billets. La navette arrive, blindée. La moitié de la foule arrive à monter, pas nous. Je dis « plus tard » pour valider puisque l’appli me le demande. Je discute avec une dame qui ne parle qu’arabe mais on finit par se comprendre, je la rassure la navette va bien à Montpellier, vers le tram. Une autre arrive, nous montons mais par l’arrière, devant c’est impossible Je ne valide pas, du coup. Les billets. Qui n’existent absolument pas sur le plan matériel. J’éteins même le téléphone et je m’accroche, on se prend deux trottoirs, c’est épique.
Nous attrapons le tramway, et je cherche cette fois à valider mes billets. Une femme me dit que ça n’existe plus, je fais enfin le lien avec ce que m’a dit le policier, j’ouvre mon appli pour le faire manuellement sur le téléphone : les billets n’existent plus. Ni dans l’historique, ni là à venir, rien. Je viens de payer, je ne le ferai pas deux fois. Je m’obstine, et devinez quoi.. ben je redémarre le téléphone en croisant pour que des contrôleurs n’arrivent pas là maintenant. Et ça fonctionne, les billets sont visibles. Je les valide, je les prends en photo (je n’ai plus confiance) et j’essaie de souffler. Kira parle à peine, je suis en train de la perdre, le voyage devient un calvaire (mais elle veut continuer).
Nous arrivons à l’expo d’Arcane avec joie (article, plus tard). Elle est petite mais chouette (mais petiiiite). Avec regret, nous n’avons pas le temps pour voir les vidéos, de toute façon Chouette s’en fiche (elle n’a pas vu la série) et Kira n’en peut plus.
On s’arrête acheter une pâtisserie qui nous remonte un peu, et on file à la dédicace, pile pour le début, 17h (article plus tard, donc).
La photo la plus moche de Jinx et Caitlyn, à l’expo : je suis épuisée, j’ai pas l’énergie pour demander une vraie photo et de toute façon à partir de là elles sont toutes soient floues, soient pas droites, soit les deux.
Non derrière ce n’est pas Vi, c’est sa couleur de cheveux « naturelle », pas un cosplay. Mais si on veut vraiment, c’est elle.

Le retour est épuisant (les TER font un boucan venus des enfers), mais il se fait. Même si Kira est une forme inhumaine et muette. Même si je me retiens de pleurer de la voir comme ça. Même si nous avons un changement et que je ne sais pas si elle va y arriver.
LeChat nous récupère, et ça fait tellement de bien de le toucher. Juste, le toucher.
J’ai emporté avec moi et par inadvertance, la clé de la boîtes aux lettres, ça fait donc une semaine que deux livres vivent une vie humide et pluvieuse, ceux-là même que les maisons d’édition (via Babelio) n’envoyaient pas. Ils ont attendu mon absence et mon étourderie pour se faire. Ils vont bien, malgré.
Lorsque j’entre dans la salle de bain je me prends de plein fouet la pièce, c’est un sentiment physique de « je suis au milieu de ce que je connais » qui me sidère pas sa force, ça me coupe la parole et inquiète une seconde LeChat qui regarde la très légère pagaille comme si finalement quelque chose n’allait pas. Or, tout va bien. C’est tout l’inverse, je réintègre à cet instant mon chez moi depuis l’intérieur de celle que je suis, il s’agit d’un réalignement brutal entre un corps épuisé qui a vécu milles choses en sept jours et autant d’espaces différents, et le glissement vers le connu. Je suis chez moi, et j’en pleurerais.
Et d’ailleurs, je pleure. Ça coule tout seul alors que je tente de manger à 22h15 les burritos préparés par l’amoureux, s’échappe la journée mais surtout Kira ; il y a un désespoir sans limite à voir son enfant sombrer. Elle est sur son lit, repliée.
Le soir, et en réalité il est minuit passé, nous réintégrons nos corps l’un contre l’autre, dormir dans la chaleur de l’autre, l’odeur de l’autre, l’existence de l’autre. Ce soulagement.
Jeudi 20
La matinée commence à 10h. Ma belle-mère arrive alors que je n’ai encore rien entamé, ni le petit déjeuner ni la machine à étendre (lancée par LeChat avant son départ au travail), ni même le domptage des cheveux, je soupire un peu. Alors que j’étends la machine, c’est mon beau-père qui freine mon élan et discute un bon moment. Quelque part, je dois leur avoir manqué.
Petit déjeuner à midi, donc. Dehors le ciel gris soulève un linge qui va peiner à lâcher son humidité, mais il fallait bien tenter…
Sur Babelio une autrice me contacte. Nous avions échangé des mots précieux en novembre et décembre 2022, sans pour autant nous suivre ensuite (pudeur ?). Son livre m’avait touchée profondément, d’abord pour le prénom Ambre de son héroïne mais aussi pour son écriture lumineuse. Je m’aperçois que c’est moi d’ailleurs, qui ait mis fin à l’échange, je suis celle qui n’a pas répondu. Je ne sais pas pourquoi. Cela m’arrive parfois, lorsque le monde est trop, de tout arrêter puis d’oublier de reprendre ce que j’ai mis en suspens, de ne pas oser aussi, lorsque trop de temps a passé.
Cette dame m’écrit, donc. Elle a édité un nouveau roman et elle m’a mise dans ses remerciements. Elle. m’a. mise. dans. ses. remerciements. Une autrice que je ne connais qu’à peine mais qui elle, se souvient de mes mots. Je suppose que mon nom sera simplement cité parmi d’autres, mais tout de même je suis si touchée (et dans l’incompréhension, un peu, aussi, mais qu’est-ce que je fiche-là).
Il me faudra me le procurer, l’évidence est là. Et puis elle édite elle-même ses livres, le soutien sera d’autant plus important. La vie est une dinguerie, sachez-le.
J’envoie un message à la librairie Planètes interdites, si deuxième session il y a, nous voulons tellement en être. Ils me répondent très vite, c’est impressionnant. Nous sommes dans la boucle pour un contact ultérieur, si. Je croise.
En tant que mère indigne très fatiguée j’ai oublié, c’est LeChat qui me le rappelle. Demain, il y a l’anniversaire de Chouette.
[si ça se trouve, il y a des phrases démarrées et pas terminées.
Ou des idées lancées par-dessus le téléphone.
Ou un tas de pensées qui ne sont pas allées au bout.
J’envoie quand même]
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Passionnante vidéo, je découvre la jeune femme :
=> Faut-il cancel la science-fiction ? (et comment je me suis réconciliée avec le genre) – Margorito
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On sent combien ces rencontres parisiennes ont compté. C’est toujours un grand moment le face à face, après les mots, l’écran, tout ce qu’on sait d’une personne et ce qu’il reste à découvrir. Quant au sentiment de trop, cette sensation est en moi quasi chaque jour, j’essaie de la faire taire mais c’est plus fort que soi, non?
Voir son enfant souffrir c’est terrible, oui. C’est pour ça que se tenir à côté, si proches, se toucher, ajuster les souffles, c’est ce qui apporte douceur, au moins l’instant que cela dure. La proximité et sa peau d’enfant est ce qui m’a toujours tenu aux instants les plus douloureux.
Belle soirée!
J’en ai tellement marre d’angoisser comme ça, de cette sensation d’être en trop, c’est insupportable. Je ne sais pas comment faire bouger cette ligne, pour l’instant. Oui, c’est plus fort que soi… J’aimerais être plus forte que moi.
♡
Des bises douces
Tellement réconfortant de rencontrer des amies futures ♥
Et hallucinant cette histoire de billets sur le téléphone, j’avoue j’ai pas tout saisi mais on sent bien que ça a du être bien galère. A ta place, j’aurais eu vraiment envie de jeter le téléphone sous le train aussi !
Tellement ! Je trouve ça toujours autant extraordinaire ^^
Ah mais ils m’ont achevée ^^’ Tout se dématérialise de plus en plus, et ce n’est pas forcément une bonne chose.
<3