Imaginer une solitude si écrasante
– L’invention de la solitude, Paul Auster
que pendant des centaines d’années on ne puisse plus respirer.
J’oublie, toujours, le pouvoir d’écrire. Cela ne cesse de m’étonner comme l’acte de poser les mots me rattrape lorsque je sombre. J’avais besoin d’accepter comme je ne les aime pas, comme ma famille n’est pas aimable. Et c’est difficile pour moi, je voudrais apprécier tout le monde, je comprends tellement les enjeux, je comprends tellement ce qui se joue pour l’autre qu’il en devient pratiquement impossible de le détester. Une fois qu’on sait pourquoi quelqu’un est ainsi, ça aide tellement à la voir comme une personne véritable – sans excuser pour autant. Et cela me déchire, cette presque détestation.
L’ambivalence de l’amour familial que l’on exige que tu portes, et la personne qui ne sait être que détestable, que tu ne peux absolument pas conserver proche de toi. L’intégralité de la famille. Toute. Entière. Perdue pour moi.
Un énorme poids s’est retiré de moi hier après-midi, et pourtant ce matin l’angoisse me clouait allongée. Je sens une blessure dans la poitrine, et je crois qu’il s’agit de celle de l’abandon. Cette peur, terrible, asphyxiante, d’être laissée, non aimée. Et peut-être que ma difficulté à détester les gens vient de là, de ma peur de l’être, moi. Détestée et abandonnée. Bien que je revienne de bien plus loin encore, que ce chemin me soit désormais bien connu, je n’ai toujours pas soigné pleinement cette blessure, et je ne sais pas si elle pourra l’être un jour.
J’essaye.
En attendant, la douleur de la colonne vertébrale a été divisée par trois et ça me rend folle de voir comme on se fait du mal à soi-même facilement et sans vraiment le réaliser
– ou surtout, comme je me fais du mal à moi-même.
Partages
. Manga : Les carnets de l’apothicaire (version 1 pour le graphisme, version 2 pour le ‘sérieux’)
. Musique : Enemy (sped up) – Tommee Profitt
Pour son côté absolument implacable
En savoir plus sur Carnets
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Il y a plein de réflexions très intéressantes ici. L’écriture libère quelque chose pour soi, et le partage des mots peut tellement parler à d’autres.
Je retiens cela « Et peut-être que ma difficulté à détester les gens vient de là, de ma peur de l’être, moi« . Voilà je comprends soudain beaucoup de choses sur moi. Merci
Avec plaisir, je suis toujours heureuse lorsque cela parle à d’autres. J’aime beaucoup cet espace, pour ça..
Trop trop bien le morceau de Tommee Profitt. J’aime beaucoup l’originale aussi, celle qui est un peu plus lente.
Ça fait plaisir de voir que l’écriture te libère. C’est « marrant » parce que j’ai longtemps été persuadée que j’étais douée pour l’introspection écrite, et c’est le cas, mais sur les sujets les plus douloureux je crois que j’ai souvent manqué de recul, et c’est la parole qui m’a libérée.
L’originale est belle aussi c’est vrai ! Mais je ne sais pas.. j’aime encore plus celle-ci, plus profonde, elle me donne une sensation impressionnante d’impossibilité d’en sortir. Implacable, vraiment le mot qui me vient..
Une autre, plus lente, a été créée également mais non, c’est ‘celle-là’ : )
C’est intéressant ça, tellement. J’aimerais beaucoup, mais ce n’est vraiment pas ainsi que je fonctionne le plus. Je peux décortiquer par la parole aussi (selon la personne en face de moi), mais ça ne sera jamais pleinement ancré tant que je ne l’aurais pas passé ensuite à l’écrit. J’imagine que cela vient de ce qu’on m’a empêché, enfant. La parole impossible.
Mais si tu y arrives, c’est que tu es bien entourée et c’est précieux !
Pour être tout à fait honnête, ce n’est pas vraiment moi qui ai décortiqué par la parole. C’est ma sœur, par ses questions incroyablement pertinentes, et mon conjoint, parce qu’il exprime ses émotions. C’est ça qui m’ancre. Le reflet. Mais comme tu le soulignes, cela ne fonctionne que parce que j’ai en eux une confiance absolue, et pour eux un amour qui l’est tout autant.
Ils m’ont permis de dépasser une parole impossible parce qu’ignorée ou rabaissée. Je crois que je te comprends. Mais qu’importe la manière, et je ne peux qu’éprouver de la gratitude pour les ancres que tu laisses ici, qui sont pour moi autant de reflets, certes déformés parce que nos expériences respectives sont différentes, mais néanmoins riches d’émotions connectées et donc d’enseignement.
Je suis heureuse pour toi, que tu sois entourée de ces personnes formidables en qui tu as toute confiance. C’est si beau, si important… C’est une chance merveilleuse.
Heureuse aussi, si mes mots et mes avancées-expériences parfois tâtonnantes t’apportent par échos, reflets, émotions. Cela m’apporte à moi aussi, de savoir que cela continue son chemin à travers d’autres, à travers toi. Merci, tes mots me sont précieux – de ne pas être seule, d’aider un peu, plus loin que moi.
Tu n’imagines pas à quel point… 🙂 <3
<3