Surprise en cherchant Prince hier, dans la médiathèque, de tomber sur mon groupe, assis, discutant, surprise de reconnaître de loin la voix de celle qui nous tient soudés une fois par mois autour de nos livres.
J’ai oublié.
L’acte manqué me parle comme un rejet de parole, rejet de dire à haute voix mes lectures féministes, rejet d’écouter celles des autres, rejet d’un espace qui habituellement me ranime. Il semble, je ne suis pas encore prête pour autant de sociabilité, malgré un thème pour une fois ‘un peu’ engagé.
Je suis repartie sans être vue, je crois. J’espère.
Je ne sais pas si je dois être triste d’avoir oublié, je n’avais rien noté dans mon agenda, pas davantage sur mon application, l’importance a dû se rompre. Deuxième rendez-vous littéraire raté avec moi-même, depuis sa mort.
À ce propos, je me suis acheté un agenda avant toute cette histoire d’enterrer des mères et des enfances, il était censé remplacer l’application que j’oubliais de consulter. Elle a fonctionné deux années et soudain mes yeux ne se posaient plus dessus : les problèmes ont commencé à arriver et j’ai pensé qu’il valait mieux revenir au papier, bien ouvert sur le bureau.
Et le premier jour de l’année, à la place des rendez-vous que je devais reporter, je me suis mise à écrire quelques mots sur la journée écoulée – la force de ce mot, écoulée, imagine l’eau coulant sur la fin de la journée.
J’écris mes heures sous forme de notes. C’est un peu froid et sans vie, un peu comme la vie aux fenêtres, gris d’émotion et d’hiver. J’y dis les journées, les impromptus, les habitudes, le repas cuisiné, les courriers, les sms, les oiseaux rencontrés et les livres lus. En tout petit, le format n’est pas énorme. Ça tient bancal. Je ne sais pas pourquoi je me suis mise à cette écriture journal, mais le côté encadré, tenu, me réussit mieux qu’un carnet aux pages trop blanches. Je me trace, sans poésie. Chirurgical.
L’exercice est… étonnant.
Plus étonnant encore, j’ai recommencé à regarder mon application pour les rendez-vous et je ne rate plus rien – vague impression de m’être fait mener en bateau par mon inconscient.
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